Seattle est au rock n'roll ce que Bethléem est au christianisme.
Spin Magazine (1992)

On a besoin qu'il arrive à nouveau quelque chose comme ça - pour changer la face de la musique. Tout de suite!
Mike Inez (Alice In Chains)

08/11/2014

Proto géo-sociologie du grunge...


C'est dans le North West qu'on a inventé le terme "soucoupes volantes". C'est la capitale mondiale des sérial killers... Je veux dire : la famille Mason venait en vacances ici!!! Ce coin est zarbi. Art Chantry (illustrateur affichiste vedette du Seattle Sound, dans Hype!)

L'autre fois, en bon passionné de trucs invraisemblables d'une part, et des côtes, montagnes et forets sauvages du nord ouest pacifique d'autres part, je me suis mis à lire un bouquin finalement très intéressant (oui finalement), sur le sasquatch, ou bigfoot, ce yéti légendaire d'Amérique du Nord, qui vivrait un peu partout mais surtout, surtout dans l'Oregon et le Washington State. Ça s'appelle "Sasquatch et le mystère des hommes sauvages", et c'est écrit par un français tout ce qu'il y a de plus sérieux (Jean Paul, prof à l'université de Nantes, belle moustache franchouillarde)... Bon, alors moi je m'attendais à avoir plein d'infos sur la bête, pleins de témoignages tous aussi flippant les uns que les autres... et en fait j'ai surtout eu un récit personnel sur l'attachement du mossieu en question à cette région des States, aire géographique particulière, toute faite d'une humidité terrible, de forêts et d'arbres géants, de vallées sauvages, de fleuves encore plus sauvages (la Columbia!!!), d'amérindiens oubliés de l'ogre capitaliste etc... Bon, l'un dans l'autre, ça m'allait bien, parce qu'il y a une part de moi, grande, qui est irrésistiblement attiré, depuis tout petit, par le North West Pacific. Au point de lire des tonnes de trucs sur le sujet. J'saurais pas dire pourquoi... Un truc que j'aime bien aussi, c'est que la région est également connue pour nombres de bizarreries ésotériques, comme celle d'avoir été le lieu des premières observations contemporaines d'ovnis (voir le docu référant ICI), avant même Roswell, ou celui d'observations diffuses d'hommes singes gigantesques (nombres de témoins affirmant avoir vu des hominidés haut de plus de 2,50m)... Et n'oublions pas que l'intrigue d'une des premières séries archi chelou de la télévision moderne : Twin Peaks, se déroule ici même!!! Pas de hasard... This place is werd...

Et c'est dans cet environnement particulier que nait dans les années 80 un mouvement musical qui révolutionna le rock : le grunge!!! Rien d'étonnant me direz vous... Quoi qu'on fasse, on est le produit de son environnement. Physiquement et psychologiquement aussi. Les éléments burinent les hommes... C'est une évidence que seule une telle aire géographique pouvait engendrer des groupes aussi barrés que les Melvins ou les U Men, aussi dépressif qu'Alice In Chains, aussi doomesque que Soundgarden (dans l'esprit, bien que dans le son parfois...) ou YOB (dans le son et laissez moi réfléchir...... dans l'esprit aussi), ou dronesque, par la suite, tel Earth, pionnier du genre, ou Sunn O))) et Master Musicians Of Bukkake. Un album tel que que Superunknown est à mon gout une bande son plus qu'idéale pour appréhender une telle région à la météo instable, aux immensités sylvestres hors de propos, et à une nature tellement sauvage que des petits frenchies comme nous se pisseraient dessus au premier craquement de branche. Je m'imagine tellement bien au volant d'un vieux pick-up dégingandé, voguant au son de Fresh Tendrils ou Like Suicide, traversant la Okanogan National Forest, longeant les rives sauvages du Puget Sound, essuyant le climat détrempé des Olympics Mountains. Et je m'imagine tellement mal perdu au milieu de la forêt par une nuit d'hiver, au son de Nothing To Say, poursuivi par un vague grand singe sorti tout droit de la préhistoire et les copains de E.T cherchant à m'ausculter le cerveau avant de me rendre à la civilisation débilisante... Toute la musique généré dans les 90's par les groupes du coin suinte de l'ambiance des lieux, de l'atmosphère d'une région qui ne peut s'aborder sans une pointe d'appréhension et de mystère. Ça pour sûr on n'est pas sur la côte d'Azur!!!

La musique de Seattle est à jamais attaché pour moi, à Soundgarden, Pearl Jam et Mudhoney..... ainsi qu'aux énormes camions transportant des troncs de 10m de long, aux séquoias géants, aux indiens Squamish (vous savez, ceux des totems), à la végétation luxuriante, au froid, aux grizzlis et à la nature la plus sauvage qui soit. Et à la pluie! Un truc qu'est immanquable, depuis le temps, c'est que mes disques de grunge tournent beaucoup plus l'hiver que l'été. Le grunge c'est un état d'esprit!!!! Ça veut pas dire que je navigue dans le spleen en permanence, bien au contraire, j'aime la Vie et elle me le rend bien, mais j'sais pas... Y'a une grande part d'humidité dans ces disques là qui font que perso j'aime bien m'en jeter un par jour de grande pluie...

Voili voilou, c'était la chronique du jour, en attendant de vraies chroniques musicales... Et n'oubliez pas : le Bigfoot existe vraiment : je l'ai vu. A moins que... J'saurais pas dire... C'était p'têt mon voisin Bernard qui pissait derrière la haie une nuit sans lune perché sur les potiches géantes de madame avec trois grammes dans le sang en beuglant comme un ours qu'on égorge... Sasquatch de voisin de merde... Tu pourrais te raser de temps en temps merde alors...

23/06/2014

Compte rendu Hellfest 2014 : Therapy?, Walking Papers et Soundgarden!!!

Et ben ça faisait longtemps!!! Un manque de motivation allié à douze tonnes de tafs divers et variés, font que Seattle Grunge est ce que l'on peut désormais appeler un blog en standby!!! Ca reviendra... Ou pas... Oulala c'est pas les choses qui manquent à dire, loin de là, mais bon, j'ai besoin d'un plus de motivation. Tenir un blog comme celui ci demande franchement des heures de tafs, à trouver les bonnes infos, écrire des articles qui apportent un petit quelque chose à l'affaire, rédiger des interviews en français, les traduire en anglais, sans forcément être assuré d'avoir une réponse, retraduire en français quand réponse il y a, se tenir informé des news et gnagna et gnagna... Enfin bon, j'en suis là!!! Un p'tit challenge qui pourrait être sympa quand à la suite à donner dans la continuité du blog, et dont j'ai évoqué l'idée avec Cyril Jégou, l'auteur de Pulsions Vitales, le bouquin sur PJ sorti chez Camion Blanc en début d'année, serait de sortir un petit bouquin sans prétention qui reprendrait une partie du blog, augmenté de nouveaux articles... On y pense gentiment... 

En attendant, ce WE, et hier en particulier, on s'est maté Soundgarden avec le dit Cyril et Sly, du blog Seattle Sound... C'était en live au Hellfest bien sûr!!!!! Et je ne pouvais pas manquer de donner mes impressions sur ces trois jours... D'autant qu'on a vu une belle brochette de musicos des années 90!!!

Le vendredi, Therapy? a donné un set dense composé en grande partie de morceaux de l'album phare du groupe : Troublegum... Qui au passage prend 20 ans cette année... Un groupe un brin timoré en début de concert selon moi, mais l'impression première s'estompe vite à l'écoute de morceaux tous aussi parfaitement choisis et exécutés les uns que les autres... Tout ce qu'on aime sur albums se retrouve en version live : cette frappe de batterie sèche et claquante, une basse ronflante et des riffs percutant lorgnant sur le coté metal du rock... Un excellent moment qu'un fan des nineties ne pouvait ni manquer ni ne pas apprécier!!! Le set complet en dessous...


Walking Papers, dont la musique n'est ni metal ni même hard rock, a pourtant fait son petit effet sur le public du Hellfest... Juste avancer que Duff, ex Guns N'Roses, est membre de ce groupe suffit à faire déplacer une bonne petite troupe autour de la Mainstage 1... Mais honnêtement, Barrett Martin y est pour beaucoup quand au fait de donner un vrai coffre aux morceaux du groupe, et Jeff Angel, ce quasi inconnu avant que Walking Papers pointe le bout du nez, est le réel plus de la bande : un frontman charismatique doublé d'un excellent guitariste font que ce concert fut très objectivement un des meilleurs du festival, le groupe proposant un rock d'une maturité évidente, trop rare sur l'ensemble des trois jours...

Soundgarden, enfin, a fait le boulot d'une fort belle manière. On ne peut être déçu que d'une chose, c'est que le format festival n'offre qu'une petite heure à un groupe de cette ampleur, qui pourrait en donner tellement plus... Un son moyen au début, il aura fallu que Shepherd se fache pour que ça s'améliore drastiquement... Superunknown a lui aussi 20 ans cette année, et bien sûr, s'il fallait mettre en avant un album, c'était celui là... Badmotorfinger n'est pas en reste, ces deux albums fournissant 90% du set... Le concert se termine sur l'emblématique Beyond The Wheel, annonçant la couleur pour le show du Sabbath Noir à venir... Que dire de plus : globalement du coup, un très bon son qui contraste évidemment avec leur venue en 2012 à Paris, une excellente setlist même si un vrai fan en demandera toujours plus, un groupe très en forme et fidèle à lui même : un Cornell qui tchatche pas mal, un Shepherd bougonnant mais manifestement heureux d'en être, et un Thayil zen au tricot... Matt Chamberlain s'en est très bien sorti... Franchement pas vu la différence!!! J'ai toujours pensé que Soundgarden pourrait en remontrer au public du Hellfest en terme de riffs heavy et d'intensité... Ils l'ont prouvé d'une fort belle manière... Un Beyond The Wheel ne peut laisser indifférent un fan ultime de gros son...


Voili voilou... Si j'avais un top 5 à donner en dehors des 3 suscités plus haut (je peux pas être objectif avec ceux là), j'dirais bien ça, très subjectivement et dans le désordre le plus complet : 

Electric Wizard, parce que j'ai encore pris une surdose d'infrasons, et putaing que c'est bon,
Clutch, pour le son parfait, et le boogie stoner rock d'un groupe unique en son genre,
Soulfly, pour le coté ultra tribal de la batterie du fiston Cavalera (17 ans le môme??) que Sepultura n'aura jamais, même si j'ai pris du plaisir avec ces derniers... 
Against Me, la surprise totale que nous a valu l'énorme foule massée devant Aerosmith, laquelle nous a fait fuir et décidé de prendre une petite bière pèpère sur la Warzone devant un groupe au punk rock magnifiquement exécuté, accrocheur et sans ennui... Et pourtant je suis pas un fan ultime de punk, loin de là...
Dozer parce que le desert rock de ces éternels outsiders de la scène stoner allie puissance et finesse qui sont la marque de fabrique des très grands,
Et Iron Maiden parce que là aussi, je suis loin d'être un grand fan, mais curieusement je ne me suis pas ennuyé une seconde!!!

Et ben en fait c'est un top 6... A plus les amis, et au plaisir de vous retrouver sur Seattle Grunge, si Dieu le veut!!!

11/01/2014

Satchel versus Brad : qui est qui???

Tiens ouais d'abord, pourquoi on parlerait pas de Satchel???!!! Un groupe plutôt atypique dans l'univers du Seattle Sound, et pourtant... Quelle voix!!! Mojo Mag ne s'est certainement pas trompé en catapultant Shawn Smith parmi sa liste des meilleurs vocalistes de tous les temps... Et que fout ce piano sur un disque étiqueté "grunge"!!! Ceci dit, l'ensemble sonne plutôt pas mal, j'irais même jusqu'à dire que, merde alors, c'est bô!!! Vous l'aurez compris, Satchel ne ressemble à rien de ce qu'on connait du son de Seattle. Oui mais Satchel, c'est d'abord et avant tout Shawn Smith, chanteur multi instrumentiste. Un touche à tout qui fut aussi l'alter ego d'un autre foutraque nommé Steve Fisk, personnage éminemment important au sein de la mouvance informelle du Seattle Sound, ce dans la classieuse formation électro rock Pigeonhed... Et pis bon, Shawn Smith, c'est aussi l'un des partenaires de Stone Gossard, fameux guitariste de PJ, chez Brad... Satchel et Brad, d'ailleurs qui fusionnèrent quasiment à un moment, sortant même en 2005 un disque intitulé Satchel vs Brad... Il faut dire à ce stade que l'autre élément indissociable de Satchel / Brad répond au doux nom de Regan Hagar... C'est qui lui?? Ben, humblement, Regan Hagar, c'est quand même le batteur d'un groupe précurseur du Seattle Sound : Malfunkshun, dont le leader n'était rien moins que Landrew, le dieu de l'amour, ou plus simplement Andrew Wood, futur chanteur de Mother Love Bone... Bon, on va s'arrêter là pour les explications croisées, parce trop d'explications croisées tue les explications croisées... 

Shawn Smith est né à Spokane, Washington State, et s'installe rapidement dès le début des années 80 à la capitale, Seattle... C'est un fan d'Elton John, Kiss ou encore Queen, mais par dessus tout, c'est Prince qui révèle son envie de jouer et chanter... On comprend mieux dès lors d'où viennent les sons si particulier de Satchel, Brad ou Pigeonhed, ces mélanges improbables de rock, jazz, soul ou funk... L'homme se met à composer immédiatement, mais c'est surtout au début des 90's que ses projets phares prennent forme... 

Regan Hagar (batteur de Satchel/Brad/Malfunshun) : J'étais ami avec Shawn Smith depuis qu'on avait bossé ensemble chez Tower Records... Un jour il m'a fait écouté une cassette. C'était lui, une boite à rythme, et un synthé à deux francs. J'étais à fond dans Prince à l'époque, et lui aussi. Ça sonnait funky, et je lui ai dit : "Mec, t'as vraiment une super voix - on devrait monter un groupe funk". On s'y est mit, et on a joué avec pas mal de monde en ville.

Shawn Smith (chanteur de Satchel/Brad/Pigeonhed) : Moi, Stoney et Regan avons jammé à l'occasion. A l'époque, Regan et moi étions déjà parti prenante dans Satchel. On avait déjà les bases d'un morceau, et Stoney a dit "Il faut qu'on réserve un studio pour une ou deux semaines, et quand je reviens de tournée, on fait un disque". C'est comme ça que Brad est né.

Satchel et Brad resteront à jamais deux groupes jumeaux, et il n'est pas indécent de dire que, sans Brad, Satchel n'aurait jamais connu le succès d'estime qui lui était dû... 

Regan Hagar : Pearl Jam venait de décoller. Je pense que Stone n'a pas tardé à toucher son premier chèque. Donc il avait du succès, et il a pensé : "Vous voulez aller en studio les gars? J'ai un peu de fric - je paie". Il a allongé le fric pour sept jours aux studios Avast!. On voulait pas de Kory Kane, le bassiste de Satchel, parce que ça aurait voulu dire Satchel avec Stone. Donc Stone a fait venir un pote à lui, de LA, Jeremy Toback. On a tout écrit en studio... Stone a vraiment aimé le résultat, et l'a présenté à Sony, qui a immédiatement voulu le sortir. D'un coup on était invité à New York, à dormir dans des supers hotels. Finalement, Sony s'est rendu compte que Shawn et moi étions aussi dans Satchel. Boom - Satchel était signé aussi. Le rêve devenait réalité.

Le premier album de Brad, Shame, sort donc en 1993, suivi du premier Satchel, EDC (1994). Mais tout ne se passe pas comme prévu...

Regan Hagar : Il y avait des sérieuses tensions entre Brad et Satchel d'un coté, et PJ de l'autre. Certains membres de Pearl Jam nous accusait de suivre le train en marche. Avec Shawn ça nous a rendu furieux. J'étais à Seattle à jouer de la musique bien avant tous ces gars!!! (...) Je pense que c'est correct de dire que si Brad n'a jamais vraiment explosé, c'est parce que Pearl Jam ne voulait pas que Stone en soit. Ils pensent différemment maintenant. Mais c'est trop tard...

Satchel et Brad sont toujours en activité, l'un a sorti Heartache and Honey en 2010, l'autre United We Stand en 2012, passant même par la France pas plus tard que cette année... Shawn Smith continue quand à lui en parallèle une carrière solo, qui, sans être couronnée d'un succès faramineux, n'en continue pas moins d'être florissante... Reconnu désormais comme un artiste talentueux, il n'est pas rare de le voir aux cotés de Greg Dulli (ex Afghan Wighs, qui dira de lui qu'il est encore aujourd'hui le secret le mieux gardé de Seattle) ou Lanegan... Des aperçus de Satchel, Brad et Pigeonhed dans la playlist Grooveshark à droite. Plus bas une vidéo issue du premier Satchel, EDC, suivi d'un live on KEXP de Brad, et d'un Pigeonhed live bien sympathique...