Seattle est au rock n'roll ce que Bethléem est au christianisme.
Spin Magazine (1992)

On a besoin qu'il arrive à nouveau quelque chose comme ça - pour changer la face de la musique. Tout de suite!
Mike Inez (Alice In Chains)

06/02/2011

Girl Trouble ou le retour du garage rock

Gros titre de Backlash (un autre gratuit musical de Seattle) à propos de Girl Trouble : Ils habitent à Tacoma. Ils regardent la téloche. Ils bouffent de la viande. Ils répètent de temps en temps. Rien qu'une phrase comme celle là en dit gros sur l'attitude d'un groupe ordinaire, sans génie particulier, mais qui cherche simplement à donner du plaisir de la manière la plus fun possible. Sans vraiment d'ambition sinon celle de faire son petit trou dans l'état de Washington. Façon de dire, ils n'iront pas beaucoup plus loin, mais ça nous suffit largement.

Formé en 1984, Girl Trouble laisse d'une manière plus ou moins visible sa petite empreinte de petit doigt de pied à l'aventure grunge sur, entre autre, la compilation Sub Pop 200 (1988). le groupe est à ce titre, à l'époque, un de ceux sur qui, à défaut de miser, on peut compter. Ils passeront d'un bout à l'autre de leur carrière de covers des Cramps à celles de nombreux garage bands du nord ouest étatsunien : Frantics, Viceroy ou Tiny Tony en tête. Ce tout en écrivant des morceaux originaux hilarants :

Scott Mc Caughey (chanteur des Young Fresh Fellows) : Ils jouaient des morceaux sur les filles, le café, danser, le rock n'roll, les filles en prison, les indiens, les trains, le sexe, les filles de rêve, les gitanes, ça vous donne un petite idée. Des sujets importantes.

Bill Henderson (guitariste de Girl Trouble) : On a commencé à jouer juste pour nous. Bon avait une batterie à 75$ de chez Sears. J'avais une guitare que j'avais fait moi même en classe de bricolage au collège. Quand j'ai demandé à Kurt de chanter il disait qu'il ne pouvait pas. Je lui ai répondu que c'était ok vu qu'on ne pouvait pas jouer non plus. (...) On ne faisait pas ce qui était attendu qu'on fasse, et avoir Bon dans le groupe était spécialement pas cool du tout. Premièrement, c'était une fille qui jouait de la batterie. En plus de ça, c'était ma sœur. Pire : elle avait 10 ans de plus que moi.

Comme la presse locale ne frappe pas particulièrement à la porte pour les soutenir, que font les Girl Trouble? Ils éditent un fanzine pardi! : Wig Out !! 24 numéros sortiront. Particularité : il ne parle pas exclusivement que du groupe, mais c'est tout comme. Faut se donner les moyens de ses ambitions!!!! Girl Trouble peut être certainement vu, à l'époque, comme l'élément moteur du revival garage punk, de ce coté fun punk qui deviendra de plus en plus prépondérant au sein d'une partie de la scène de Seattle, Mudhoney en tête. C'est via un partenariat Sub Pop / K Records qu'ils signent leur premier album : Hit It Or Quit It. Une certaine notoriété suit :

Bill Henderson : On a eu notre premier gros succès au Tropicana à Olympia. Ils pensaient qu'on était un gentil petit garage band. Ils pensaient que Kurt était mignon. Puis est arrivé Dave (David Duet, futur chanteur de Catt Butt, intérimaire pour un temps au chant), qui était un peu plus rude. Il était pas rare de le voir bourré et de se laisser tomber sur les filles. La frange engagée d'Olympia n'aimait pas trop ça. Mais Dave était plus doué que nous autres pour aller parler aux gens, grâce à ça il nous a aidé à se faire connaître à Seattle.

Le truc du groupe, c'est le live : le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il y a de l'idée pour faire le show. Des lots (comme à une tombola) sont jetés au public. Comme ça, pour le plaisir, parce que c'est fun.

Bon Von Wheelie (sur comment elle choisit ses lots à envoyer au public) : Si je vois quelque chose qu'on pourrait utiliser comme un lot, je me frappe la tronche avec deux ou trois fois pour être bien sûr que c'est ok.

Mais ce qui restera la vraie star des concerts de Girl Trouble, c'est Granny Go Go. Véritable go-go danseuse, elle attire les foules, hommes et femmes confondus. Sauf qu'elle est née en... 1910. Imaginez une go go danseuse de 80 ans sur scène en train de danser sur la musique d'un groupe garage!!! C'est par un concours de circonstances que Granny, qui a commencé à danser dans les années 50, se retrouve à collaborer avec le garage band.

Bon Von Wheelie : Girl Trouble était toujours en recherche d'innovation pour ses concerts. On essayait de les rendre particulièrement unique. Après qu'on ai vu danser Granny un soir en ville, on a commencé à penser que ce serait vraiment chouette de l'avoir à l'un de nos concerts. Mais bien sur, quand on a pensé ça, c'était déjà deux semaines après, et on n'avait plus vraiment moyen de la contacter. On pensait qu'on avait définitivement loupé la bonne occasion de lui demander, mais il s'est avéré, coïncidence, qu'un copain de Kurt était son voisin de palier. Il s'est arrangé pour lui faire la demande, et à notre surprise, elle s'est trouvée enchantée par la perspective de venir danser à un de nos shows. Notre idée était de la faire venir pour un gros concert, donc on l'a programmé pour un show au Off Ramp à Seattle, avec Thee Headcoats en tête d'affiche. On l'a fait danser sur une reprise d'Elvis : Little Sister. Il y avait 500 personnes dans la salle et la foule était dingue!!!! Tout le monde en redemandait.

Granny deviendra une icône des environs par ses prestations scéniques aussi curieuses que dégommantes. Elle est décédée en 1996.

Girl Trouble est encore en activité, et garde quoi qu'il arrive son sens de l'humour. Persuadés d'être invité pour les 20 ans de Sub Pop, ils ne se démontent pas quand ils apprennent qu'ils ne seront pas de la partie : c'est dans le parc attenant au festival Sub Pop 20 qu'ils organisent leur tout premier concert acoustique!!!

Des morceaux à télécharger légalement sur le site du groupe : http://www.wig-out.com/. Un morceau en streaming dans la playlist Grooveshark à droite. Girl Trouble en marge des 20 ans de Sub Pop dans la première vidéo, un extrait live dans la seconde.





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